Interview de Justice dans le denier Going Out
Bagarre, groupies, débauche, paysages et concerts apocalyptiques : le DVD-docu de Justice, c’est un road-movie parfois surréaliste qui montre que le quotidien d’un groupe en tournée peut aussi raconter une vraie histoire. A l’occasion de la sortie de « A Cross The Universe », Xavier de Rosnay, l’un des deux membres du plus Rock des groupes Electro, revient en détail sur le documentaire musical qui ponctue le premier chapitre de la carrière du groupe.
“Ce qu’on montre, c’est 0,5 % de la réalité d’une tournée de Justice. Les 99,5 % du temps restant, on est timides et on téléphone à nos mamans.”
(JPG) D’OÙ EST PARTIE L’IDÉE DE RÉALISER UN DOCUMENTAIRE ?
On savait qu’en filmant la tournée en Amérique du Nord, on allait trouver une grande variété de paysages et de climats en trois semaines seulement. De la côte Ouest, au Nord, via Québec et la Californie, on se faisait l’automne, l’hiver et l’été en moins d’un mois. L’Amérique du Nord c’est un monde en soi, y-compris en termes de variété de personnages et de situations. C’était le terrain de jeu idéal pour shooter un documentaire.
VOUS AVEZ CONFIÉ LA RÉALISATION À ROMAIN GAVRAS ET SO_ME AUTEURS DU TRÈS SULFUREUX CLIP “STRESS”... VOUS VOULIEZ CONTINUER SUR LA LANCÉE ?
On les a choisis pour plusieurs raisons. La première est qu’on est fans de ce qu’ils font. La deuxième, c’est qu’aucun des deux n’avait jamais bossé sur un documentaire. On pense que les “premières fois” sont toujours intéressantes parce qu’elles permettent d’aboutir à quelque chose d’original... Le docu, c’est vraiment un genre à part, et on voulait éviter que le résultat fasse trop “docu”, justement. La troisième raison, c’est qu’on se connait bien et qu’ils sont suffisamment proches de nous pour que leur présence 24/24h à nous filmer ne soit pas trop dérangeante ni intrusive. Ce qui permet de capter les choses de manière plus naturelle. On ne voulait pas avoir l’impression d’être suivis par une équipe de télévision en permanence. Ça nous aurait mis mal à l’aise.
VOUS AVEZ CONFIÉ LA RÉALISATION À ROMAIN GAVRAS ET SO_ME AUTEURS DU TRÈS SULFUREUX CLIP “STRESS”... VOUS VOULIEZ CONTINUER SUR LA LANCÉE ?
On s’est autocensurés mais pas pour des raisons classiques d’autocensure. La plupart des choses qu’on n’a pas gardées sont des passages qui n’allaient pas dans la direction qu’on avait choisie ou qui étaient trop “privées” et que personne n’aurait compris à part nous...
LA BASTON AVEC LE FAN : VOUS NE L’AVEZ PAS CENSURÉE...
Non, on l’a gardée parce qu’au final c’est plutôt télégénique. Ça ne veut pas dire qu’on tabasse les gens qui aiment notre musique, attention, mais comme c’est assez spectaculaire...
LE DOCUMENTAIRE EST ASSEZ SULFUREUX ET MONTRE UNE IMAGE TRÈS “SEX, DRUGS & ELECTRO”... NE CRAIGNEZ-VOUS DE SUBIR LES CRITIQUES DE CEUX QUI VOUS REPROCHENT DE FAIRE DE LA PROVOC’ ET D’ALIMENTER UN VIEUX CLICHÉ ?
Évidemment, on alimente un vieux cliché - quoiqu’il n’y ait jamais de drogue de manière explicite. Parce qu’une tournée se nourrit de vieux clichés... Quand tu mates un truc comme “This Is Spinal Tap” (film de 1984 sur un Heavy Metal band NDLR), qui est censé être une parodie de docu sur un groupe de rock, tu te rends compte que tout est tellement vrai. Après, le truc “Sex, Drug, Machin”, ça concerne aussi le public, peut-être même encore plus que nous...
"Dès le début, on a remercié le ciel de nous avoir envoyé ce chauffeur de bus incroyable qui s’entraine pour entrer au Guiness Book des Records, dans la catégorie “Voix la plus Grave du Monde”."
CE QUI ÉTONNE, C’EST LE CONTRASTE ENTRE VOS PERSONNALITÉS QUE VOUS REVENDIQUEZ COMME “TIMIDES” ET LA VIOLENCE DE CERTAINES SCÈNES... EST-CE QUE C’EST LA TOURNÉE QUI A TRANSFORMÉ VOTRE NATURE OU BIEN LES IMAGES QUI DONNENT UNE VISION DÉFORMÉE DE LA RÉALITÉ ?
Quand tu réduis 200 heures de footage à 1 heure de docu, que tu fais une sélection organisée d’images pour supporter une certaine idée, tu déformes forcément la réalité. C’est le cas pour n’importe quel reportage, documentaire ou information filmée... On ne veut pas parler de nous en tant que Xavier et Gaspard, parce que ce n’est pas le genre d’exposition qu’on recherche, et tout le monde s’en fout. Ce qu’on montre, c’est 1/200h, soit 0,5% de la réalité d’une tournée de Justice durant lesquels on est presque comme des observateurs du chaos de notre propre tournée. Et les 99,5 % du temps restant, on est timides et on téléphone à nos mamans pour leur raconter ce qui se passe. Ça, on l’a pas gardé.
L’IMPORTANCE DES RÔLES SECONDAIRES (LE TOUR MANAGER, LE CHAUFFEUR DE BUS...) : EST-CE UNE MANIÈRE DE DÉPASSER LA SIMPLE “COMPILATION D’IMAGES” POUR DONNER UNE CONSISTANCE ET UN FIL CONDUCTEUR AU DOCUMENTAIRE ?
Oui, on s’est rendu compte assez vite que la relation entre ces personnages et nous était plus intéressante que les images de concerts etc. Dès le début, on a remercié le ciel de nous avoir envoyé ce chauffeur de bus incroyable qui s’entraine pour entrer au Guiness Book des Records, dans la catégorie “Voix la plus Grave du Monde”. C’est une personnalité à l’opposée de celle de notre Tour manager. C’est un peu la lutte du Bien contre le Mal, mais de manière très étrange. En fait, il y a plusieurs manières de voir ce docu, et ce n’est qu’après deux ou trois visionnages qu’on capte la substance de chaque personnage. Alors, ça devient vachement plus drôle et bizarre. Il y a encore une autre manière de voir tout ça, mais pour la capter, il faut ouvrir le troisième oeil...
AURIEZ-VOUS PU SORTIR “A CROSS THE UNIVERSE” AU CINÉMA ?
Hmm non, Justice n’est pas assez connu pour une distribution en cinéma et ce n’était pas le but. Le truc de ce CD/DVD c’est plus un objet qui sert à clôturer le chapitre “†” de Justice, celui qu’on avait commencé avec le premier album. “A Cross The Universe”, ça signifie aussi qu’on a fait voyager cette † un peu partout. Nous n’en étions que les accompagnateurs...
DERNIÈRE QUESTION : LIAM HOWLETT A DÉCLARÉ QUE LE PROCHAIN ALBUM DE PRODIGY “SERA TRÈS INFLUENCÉ PAR JUSTICE” : EST-CE QUE LA BOUCLE EST BOUCLÉE ?
Ben on trouve ca incroyable qu’il dise ça car c’est presque à cause de lui si on fait ce qu’on fait... C’est... marrant !